Dix mois de prison avec sursis pour une ratonnade dans les serres.
Le droit, une appréciation souveraine, une sensibilité variable aussi. Contrairement au représentant du parquet, le tribunal correctionnel d’Aix-en-Provence n’a pas cru au racisme dans l’affaire de la « ratonnade » du hameau des Baisses à Lançon-de-Provence.
Six jeunes lançonnais de 18 à 28 ans, défendus par Me Ludovic Depatureaux ont été reconnus coupables, hier, de violation de domicile et de violences aggravées et tous condamnés à 10 mois de prison avec sursis contre 9 mois requis dont 4 ferme par le procureur Marion Menot. Le mineur du groupe avait eu un rappel à la loi. Dans la nuit du 20 au 21 décembre 2011, le troupeau s’était lancé en cagoules, treillis et rangers, dans une expédition armée contre des jeunes ouvriers agricoles maghrébins dormant dans un misérable cabanon près des serres à salades. Les assaillants les regardaient, sans la moindre preuves, comme responsables de dégradations et vols dans le quartier.
Mais les juges ont écarté la circonstance d’intention raciste que le procureur avait soutenu dans ses réquisitions le 18 mars. « Cette intention raciste n’était pas votre première motivation qui était d’aller faire votre justice vous-même », a commenté, hier, le président du tribunal, Benoît Delaunay, face aux jeunes gens venus prendre condamnation.
Les textos échangés entre les protagonistes étaient pourtant sans équivoque. « Tu veux venir ce soir o arabe ? », « Se soir, ratonnade ». « On a préparé des cartouches de gros sel, on va faire la battue au clando », s’était vanté l’un d’eux au bar du coin. « On en a marre de l’insécurité. On a voulu faire justice nous-mêmes. On a fait n’importe quoi. On a déconné complètement », avait reconnu l’aîné du groupe, Nicolas, un maçon de 28 ans. « Ils sont allés taper de l’arabe. Le racisme était là. Les propos, les termes sont là si les mots ont encore un sens. A croire qu’il est difficile de faire juger le racisme dans nos prétoires », réagit Me Olivier Lantelme, avocat d’une des jeunes victimes, très déçu du délibéré. Sentiment partagé par Me Clément Dalençon. Les deux avocats espèrent à présent que le parquet qui les avait entendus interjettera appel du jugement. Le tribunal a alloué 3.000 euros à deux des trois victimes frappés et 900 euros pour leurs frais.
David COQUILLE
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