Le certificateur allemand des prothèses mammaires
PIP viciées se défausse avec l’ex-AFSSAPS sur les lacunes de la
directive européenne.
8 mai 2013. Vraies victimes de la fraude aux implants mammaires PIP
ou posture stratégique pour échapper aux conséquences financières de
négligences réelles ou supposées ? Leurs constitutions de partie civile
ont paru si contestées par les milliers de femmes porteuses d’implants
viciés que l’Agence nationale pour la sécurité du médicament (ANSM) et
Tüv Rheinland, le certificateur allemand des prothèses PIP, ont du
longuement justifier hier leur présence sur le banc des victimes.
Dans une plaidoirie habile et bien servie, Me Olivier Gutkès a
défendu bec et ongles l’organisme allemand synonyme outre-Rhin de
confiance absolue. « Tüv n’a jamais été négligent car il a suivi la
réglementation européenne » dont la Commission européenne -
souligine-t-il - a reconnu les « lacunes et carences ». A ses yeux,
« les audits peuvent être impuissants face à une fraude organisée » car «
on n’est pas dans une logique de répression des fraudes. On n’a pas de
pouvoir de police. On n’est pas des gendarmes ! » Et si la directive
européenne ne prévoit toujours pas de contrôles inopinés mais des audits
claironnés à l’avance, « c’est pour faire en sorte que le jour de
l’audit les chefs de service soient présents, la documentation technique
disponible et la chaîne de production active. »
Bref, si la fraude au gel non conforme a pu perdurer de 2001 à mars
2010, c’est uniquement selon lui en raison du « degré stupéfiant
d’organisation de cette fraude » : « Nos auditeurs étaient parfaitement
spécialisés. Ce n’était pas des auditeurs en grille pain ! Mais ils
n’avaient aucune chance de découvrir la fraude. » Les prévenus ne
faisaient-ils pas « disparaître toutes les traces matérielles, écrites,
informatiques sur toute l’année et pas la veille de l’audit et fait
respecter une omerta » ? De pointer Hannelore Font, la directrice
qualité qui « incarne le visage de cette escroquerie », Loïc Gossard, le
directeur de fabrication qui faisait disparaître le gel non homologué
avant chaque audit, Thierry Brinon, le directeur de la RD qui « a remis
un dossier de conception qu’il savait être fictif », Claude Couty le DG
qui « a une calculette en guise de conscience morale pour équilibrer ses
bilans », et bien sûr Jean-Claude Mas, « parrain dans un système
mafieux. » De conclure : « Tüv n’est pas responsable. Tüv est solvable
mais n’entend pas être le fonds d’indemnisation des victimes dans ce
dossier. »
« Nous intervenons en deuxième rang »
Stratégie
identique de l’ANSM, l’agence française qui dit « comprendre et compatir
avec toutes ces femmes » mais borne son rôle : « Nous intervenons en
deuxième rang, en surveillant par le biais de la matériau-vigilance »,
glisse vite fait Me Nathalie Schmelck qui préfère dénoncer « certains
avocats qui ne cherchent ni un responsable ni un coupable mais un
solvable. » Si des signalements sont parvenus à l’agence, « pas une
seule fois, les lettres PIP n’apparaissent dans les courriels du Dr
Marinetti.» Et aucune des photos dans la lettre de dénonciation « ne
permettait de dire que les prothèses étaient constituées d’autre chose
que du gel Nusil. » L’absence de contrôles inopinés ? « Il est d’usage
quand on ne présume pas qu’il y a une fraude de prévenir pour être sûr
de rencontrer ses interlocuteurs. » Reste alors « M. Mas, c’est
l’instigateur, le dictateur et il l’est tellement qu’il n’a même plus
besoin de réitérer ses ordres car depuis dix ans tout le monde sait ce
qu’il a à faire. » Réquisitoire le 14 mai.
David COQUILLE
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