vendredi 17 mai 2013

Une fraude qui n’a laissé personne inactif

Le «ah-j’aurais voulu vous y voir» des cadres de la société replace Jean-Claude Mas au centre de l’accusation

17 mai 2013. Relaxe. Le mot est inaudible des porteuses de prothèses PIP pour lesquelles il signifie déni de souffrances. Loïc Gossart le directeur de la fabrication - après Thierry Brinon son homologue de la recherche & développement la veille - l’a demandée par la voix de Me Roland Rodriguez. Et une « relaxe pleine et entière ». Non que moralement il ne se sente pas responsable, il dit même être « rongé de honte » mais « compte tenu des actions qu’il a menées dans la société, du désaccord qu’il a nettement fait connaître », cet « exécutant » qui « a agi sur ordre » ne doit pas être condamné et sûrement pas à 3 ans de prison dont moitié ferme requis.
    A entendre son avocat, Loïc Gossart « s’est battu » et est de « ceux qui ont agi pour mettre fin à un système. Si se battre doit être considéré comme avoir adhéré sciemment à la fraude, je dis qu’il y en a plein d’autres comme lui qui ne sont pas là ». N’a t-on pas compris que « ce gel, c’est la figure imposée » par Jean-Claude Mas depuis 2001 à ses 120 salariés ?
    « La seule faute que Claude Couty a toujours reconnue, la seule, la vraie, c’est celle d’avoir laissé imposer le marquage CE sur les prothèses », a très clairement admis Me Christophe Mamelli pour le directeur général de la société PIP, celui qui a « mis en place les outils pour briser le système Mas » après avoir appris en novembre 2005 la non conformité du second gel révélé aux autorités en mars 2010. Oui « Claude Couty sait que la société est en infraction » mais « en capitaine de navire », il exclut de démissionner et ne donne pas « l’ordre de stopper immédiatement la fabrication au gel PIP, quitte à mettre au chômage 120 personnes. Pour cela il est coupable. » Reste que « Claude Couty n’a pas été l’acteur ou le complice passif et sans âme d’un scandale sanitaire. Il a agi en conscience avec les éléments dont il disposait. »
    Le combat de Me Christophe Bass pour ce même prévenu menacé de 4 ans de prison dont 2 ferme, ce n’est pas de convaincre ceux qui « n’ont rien voulu comprendre » mais à tout le moins d’ « empêcher que la justice ne soit guidée que par les sirènes de la douleur et de la vindicte des parties civiles ». « La tromperie n’est pas aggravée ce qui ne veut pas dire qu’elle n’est pas grave », nuance l’avocat qui lave du pêché originel tous les  lots traçables de prothèses produites à compter de janvier 2006 avec du bon gel homologué, ce qui libère « 7684 femmes » de tout préjudice d’anxiété. Et Couty aussi d’un poids indemnitaire équivalent.

« Vous chasserez l’opinion publique qui a déjà jugé »

    De répéter que l’usage du gel non conforme n’a pas eu « pour conséquence de rendre l’utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé ». D’asséner une vérité hospitalière à moitié tue : « Le risque (de rupture) est inhérent à tout dispositif médical implantable au gel de silicone. » La prothèse mammaire, « c’est de toute façon un produit dangereux. » Son élève avocat François Mazon  (ex-grand dirigeant d’entreprises) relayait son credo dans une première et puissante plaidoirie : « Toutes les prothèses au silicone sont dangereuses car toutes sont susceptibles d’être explantées, de rompre, de transsuder. Ce n’est pas une agence nationale qui le dit, c’est le corps qui crée une coque pour s’en protéger, et ce quelle que soit la marque des prothèses. » L’innocuité du gel est une « certitude » et « s’il demeurait des doutes, ils doivent profiter à Claude Couty. Le doute est un moteur pour les scientifiques. Dans le monde du droit, c’est une garantie pour celui qui est accusé.» De bouter les donneurs de leçons. « Ah comme je les envie ceux qui savaient ce qu’ils auraient fait à sa place, ces généraux par temps de paix, ces supporters de la victoire ! » D’expulser de la pensée des juges « l’opinion publique qui a déjà jugé » avec les mots de Me Moro-Giaferri en 1913 : « L’opinion publique, cette prostituée, qui tire le juge par la manche, vous la chasserez et vous ne retiendrez pas la circonstance aggravante ! »
David COQUILLE

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